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http://www.lemonde.fr/planete/article/2009/11/16/thon-rouge-le-quota-pour-2010-ne-satisfait-personne_1267705_3244.htmlLa pêche au thon rouge continuera en 2010, en dépit des inquiétudes sur l'état du stock, surexploité et menacé d'effondrement. Le quota retenu, dimanche 15 novembre au Brésil, à Recife, après dix jours de discussions entre les Etats membres de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta), est toutefois en nette baisse : il sera de 13 500 tonnes en 2010, contre 22 000 en 2009. La période de pêche est ramenée à un mois, au lieu de deux.
C'est un compromis entre les recommandations des scientifiques et les intérêts des pêcheurs, au premier rang desquels figurent les thoniers français qui exportent l'essentiel de leur pêche au Japon.
Résultat : personne n'est satisfait. "C'est une belle claque, commente Pierre-Georges Dachicourt, président du Comité national des pêches. La France aura 2 000 tonnes, soit 70 tonnes en moyenne par senneur (bateau de pêche industrielle). La rentabilité de certaines entreprises est compromise."
Les associations de protection de l'environnement, qui réclamaient un moratoire, sont très critiques. "C'est extrêmement décevant, affirme François Chartier, chargé des océans chez Greenpeace. On continue dans une voie qui va aboutir à la disparition de l'espèce et des pêcheurs concernés, en mettant des pansements sur une jambe de bois."
"Ce n'est pas un quota scientifique mais un quota politique, qui ne permettra pas la récupération du stock, affirme Sergi Tudela, responsable pêche au WWF Méditerranée. La Cicta a une nouvelle fois fait la preuve de son inefficacité." Un rapport publié en septembre 2008, rédigé par trois experts indépendants, avait qualifié de "parodie de gestion" les mesures concernant le thon rouge et recommandé la suspension de la pêche.
Systématiquement dépassésLes quotas négociés au sein de la Cicta, adoptés par consensus entre les Etats, sont toujours supérieurs aux recommandations du comité scientifique de l'organisation, et sont, en outre, systématiquement dépassés. En 2007, les prises réelles ont atteint 60 000 tonnes, contre 34 000 déclarées.
Dans son dernier rapport, le comité scientifique recommandait "des prises bien plus faibles au cours des prochaines années", citant le chiffre de 15 000 tonnes ou moins, tout en précisant qu'avec un quota de 8 000 tonnes, la probabilité de reconstitution du stock dans les prochaines années serait de 50 %. "Pour être en conformité avec l'avis scientifique, un quota de 8 000 tonnes ou moins aurait dû être fixé", affirme M. Tudela. Les scientifiques recommandaient également de lutter contre la pêche illégale et la surcapacité des flottes.
Pour les associations de protection de l'environnement, le seul moyen de sauver l'espèce est désormais son inscription à l'annexe 1 de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (Cites), mesure proposée par Monaco et soutenue par les Etats-Unis. La prochaine réunion de la Cites se tiendra en mars 2010.
Gaëlle Dupont