Afin de diminuer les émissions de CO2 des grosses unités industrielles consommatrices d’énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz), le principe de capter le CO2 lors de la combustion puis de le séquestrer en sous-sol est de plus en plus mis en avant par les acteurs du secteur.
Greenpeace vient de publier un rapport intitulé : « Faux Espoir : Pourquoi le captage et la séquestration du carbone ne sauveront pas le climat » qui dénonce les dangers de ce nouvel engouement.
Le premier argument mis en avant est le délai trop long de mise en place de cette technologie. D’après le rapport, la capture et la séquestration du CO2 (CSC) ne seront pas disponibles à une échelle suffisante avant 2030, or de plus en plus d’études fixent à 2015 la date à partir de laquelle les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent impérativement commencer à décroître.
Le deuxième argument est le côté « énergivore » du CSC. Pour les centrales électriques, cette technologie consomme 10 à 40 % de l’énergie produite. D’après Greenpeace, la mise en place à grande échelle « risquerait d’annuler les gains d'efficacité des cinquante dernières années et augmenter d’un tiers la consommation des ressources ». En particulier, selon l’emplacement des centrales, le CO2 capturé doit être transporté pour être séquestré. Le transport peut s’effectuer soit via des gazoducs, technologie identique à celle utilisée pour le transport du gaz naturel, soit sous forme liquide dans des citernes isothermes. Dans le cas des citernes, les modes de transport sont alors très classiques : camion, train et bateau. Si l’on ajoute à ce coût énergétique les coûts d’investissement et de fonctionnement, on peut aboutir à une augmentation du prix final de l’électricité de 21 à 91 %.
Les sommes ainsi englouties réduisent d’autant les capacités de financement pour « les solutions durables aux changements climatiques ». Pour illustrer cette dérive, Greenpeace cite l’exemple des Etats-Unis où le ministère de l’Energie a demandé une augmentation du budget CSC de 26,4 % (soit 623,6 millions de dollars) et a réduit dans le même temps de 27,1 % (soit 146,2 millions de dollars) les budgets consacrés à la recherche sur l’efficacité et les énergies renouvelables.
Enfin, un autre argument développé est le risque technique et l’impossibilité de garantir une séquestration sûre du CO2 dans le temps. Des fuites, même faibles, pourraient « saper tout effort d’atténuation des changements climatiques ».
Par ce rapport, Greenpeace veut, entre autres, alerter les décideurs politiques sur les dangers d’investir de l’argent public dans un « remède qui pourrait s’avérer pire que le mal ». Elle met en garde contre une industrie minière qui « prône activement la généralisation de cette technologie pour justifier la construction de nouvelles centrales thermiques au charbon ».
Michel Sage