HIPPISME :Suite à un contrôle positif, les cavaliers suisses pourraient récupérer la médaille de bronze du concours par équipes. Certains dénoncent cependant la traque au dopage.
PÉKIN
Un malaise. Voilà le mot qui revient sans cesse dans la bouche du spécialiste des chevaux Christian Struchen. Si Christina Liebherr, Steve Guerdat, Niklaus Schurtenberger et Pius Schwizer peuvent espérer monter sur le podium olympique, la situation indispose une partie du corps vétérinaire. Troisièmes, les Norvégiens ont été exclus suite à un contrôle antidopage positif à la capsaicine d'un de leur cheval. Les résultats de l'analyse de l'échantillon B seront connus ces prochains jours.
«J'utilise ce produit avant d'aller skier» CHRISTIAN STRUCHEN, VÉTÉRINAIRE
«La capsaicine est un composant qui agit sur l'hypersensibilité du cheval. C'est un bon produit qui est très fréquemment utilisé pour masser les montures avant ou après une compétition. C'est l'équivalent du «Perskindol». Je l'utilise moi-même pour me masser le dos avant d'aller skier, tout comme les joueurs de polo pour se chauffer les muscles», explique le vétérinaire de La Neuveville. Pourtant, la capsaicine est un analgésique classé dans les produits dopants de type A, tel que les métabolites dont fait partie l'EPO.
Les grooms utilisent depuis des années cet antidouleur, surtout chez les trotteurs pour préchauffer les muscles avant une épreuve. «En toute sincérité, je ne peux pas assurer qu'il n'a jamais été utilisé par les cavaliers suisses. Je n'en mettrais pas ma main à couper. Ce produit est entré dans les moeurs depuis des années. C'est pourtant la première fois qu'un cas de dopage à cette substance est détecté. Pour les Jeux, nous utilisons un gel à base d'arnica, mais je n'étais pas là pour surveiller. Et de toute manière, si ça continue comme ça, dans quelques années, l'arnica sera aussi classé dans les produits dopants», s'emporte Christian Struchen.
Outre «Camiro» du Norvégien Tony Andre Hansen, les chevaux de l´Irlandais Dennis Lynch, du Brésilien Bernardo Alves et de l´Allemand Christian Ahlmann ont été contrôlés positifs. «Je n´ai jamais entendu parler de contrôles positifs pour cette substance et soudain il y en a autant», réagit le Norvégien Morten Djupvik, coéquipier de Tony Andre Hansen.
Plus ça brûle, plus le cheval saute haut...
Dérivé du piment de cayenne, la capsaicine est appliquée sur les jambes des chevaux. Chez l'homme, elle a des propriétés analgésiques, mais elle provoquerait des sensations de brûlure chez les équidés. Leurs articulations devenues hypersensibles, ils auront tendance à sauter plus haut pour éviter de heurter les obstacles. «Un test a récemment été mis au point pour détecter ce produit», indique Paul Farrington, l'un des membres associés du comité vétérinaire de la fédération internationale (FIE).
«On ne sait plus quoi utiliser», poursuit Christian Struchen. «Tout devient interdit. La situation est invivable. On doit s'occuper d'animaux qui valent des fortunes, mais on ne peut bientôt même plus leur donner une aspirine. Le corps médical des chevaux de course en a marre. On n'a plus le droit de les soigner. Bientôt, il vaudra mieux les laisser crever, si on ne veut pas avoir d'ennui. On n'a tout simplement plus l'autorisation d'entretenir les montures de compétitions. Les chevaux sont plus contrôlés que les humains. Les laboratoires font tout pour trouver des cas de dopage et justifier des installations toujours plus sophistiquées.»
Si les Suisses ont de grandes chances de remporter finalement le bronze par équipes, personne ne saute de joie dans le camp helvétique. Preuve que la liste des produits dopants ne fait pas l'unanimité.
Source : TBU/«JOURNAL DU JURA»